L’objet de ce mémoire vise à rendre compte d’une action de formation en Education Physique et Sportive, conduite par un professeur d’Ecole (PE, ayant suivi un cursus STAPS,), auprès de collègues de sa circonscription. Cette action de formation est développée en vue de la préparation à l’épreuve d’admission du CAFIPEMF.
L’intérêt de ce travail réside dans le récit, sans détour, des caractéristiques d’une action de formation conduite par un « formateur en auto-formation ».
Ce récit tourne autour de l’hypothèse que « former le PE à l’enseignement explicite est un point d’entrée pour l’analyse didactique des APSA et permettrait à certains élèves de mieux s’approprier des méthodes pour apprendre. »
S’appuyant sur une analyse pertinente des difficultés rencontrées par les PE pour la discipline EPS, l’auteur arrive au constat selon lequel les PE proposent des situations d’apprentissage sans en saisir le sens en termes d’apprentissage.
L’axe de formation est donc de permettre aux PE de s’approprier un cadre d’analyse des APSA permettant de rendre les comportements des élèves et leurs difficultés d’apprentissage, signifiants. Tout l’intérêt de l’approche est alors de coupler cette formation à l’analyse des APSA enseignées tout en rendant l’enseignement plus explicite.
Cette préconisation pédagogique, qui a pour but de réduire les difficultés d’apprentissage à l’école, et qui fait consensus auprès des PE, est un pari audacieux et intéressant. Le formateur s’appuie sur un des piliers caractéristiques des gestes de métiers des PE appliqué spécifiquement à la discipline EPS, pour les amener à fonder leurs enseignements sur la prise en compte des stratégies d’apprentissage déployées par les élèves.
La mise en œuvre de l’action de formation et sa description dans le mémoire, montre une ambition trop élevée et les erreurs classiques « d’un formateur en auto-formation ».
En effet, alors qu’il s’appuie sur un référentiel de formation intéressant, celui proposé sur le site de l’IFE, O.Boutoille n’échappe pas à deux difficultés majeures.
- 1) L’action de formation débute par un recensement des besoins à partir d’une enquête par questionnaire proposé via la plateforme Google form. Schéma classique, mais qui outre le problème de la qualité des questions posées, repose fondamentalement sur une idée largement répandue que les enseignants ont naturellement des besoins de formation et qu’ils sont en mesure de les exprimer spontanément. C’est faire fi des nombreux travaux en sciences de l’éducation et de la formation que l’analyse des besoins de formation est déjà en soi un acte de formation et que ceux-ci émergent de l’identification par les enseignants eux-mêmes d’un décalage entre leurs pratiques ordinaires et celles considérées comme souhaitables.
- 2) L’action de formation est fondée sur une stratégie issue de la lecture des propositions de déroulement d’actions de formation, proposées par l’IFE et formalisée sous un schéma d’une étoile à cinq branches, que l’auteur a reproduit. Or, celui-ci ne retient de ce schéma que trois des cinq branches en évacuant la branche « lire ensemble le réel » pourtant déterminante. L’auteur mentionne la recommandation de l’IFE (p. 16) « L’un des défis de la formation est de ramener l’ordinaire de la classe pour pouvoir le décrire le comprendre … en cherchant « les bonnes raisons que le gens ont de faire ce qu’ils font », avant de chercher à quelque conditions ils pourraient faire autrement. ». Mais, concrètement, débute l’action de formation par un rappel sous forme descendante, magistrale, des prescriptions sans permettre aux stagiaires de « ramener l’ordinaire de la classe … » et décrire comment ils conduisent leurs séances d’EPS au quotidien, ce qui aurait alors permis de faire émerger des besoins de formation …
Ces deux écueils conduisent alors à des difficultés de conduite de l’action de formation, difficultés décrites sans détour, sans artifice (p. 22-25). Cette description constitue un des intérêts majeurs de ce mémoire. En ce sens celui-ci constitue en soi, un très bon outil de formation à destination des « formateurs en auto-formation » fondé sur l’analyse documentée des errements auxquels conduisent une formation élaborée de façon intuitive et spontanée.
Antoine Thépaut, MCF à l’INSPE de Lille