Les défis coopétitifs : règles et valeurs éducatives en sports collectifs

Les « défis coopétitifs » sont des jeux proposés initialement par l’équipe EPS du Tarn comme une alternative aux sports collectifs habituellement pratiqués dans le cadre de l’école. L’enjeu est de proposer des jeux qui – dans le cadre de l’obligation scolaire – permettent à tous et toutes de réussir tout en véhiculant des valeurs éducatives non basées sur le rapport vainqueur-vaincu.

Les « défis coopétitifs » sont des jeux proposés initialement par l’équipe EPS du Tarn comme une alternative aux sports collectifs habituellement pratiqués dans le cadre de l’école. L’enjeu est de proposer des jeux qui – dans le cadre de l’obligation scolaire – permettent à tous et toutes de réussir tout en véhiculant des valeurs éducatives non basées sur le rapport vainqueur-vaincu.

La formule du « défi coopétitif » vient de la contraction des deux mots : compétition et coopération. Le mot « défi » renvoie au défi que l’on se lance à soi-même et à l’équipe adverse sans qui le jeu ne serait pas possible.

Le système des jeux coopétitifs est utilisé dans le cadre de l’USEP (sport scolaire : matches de 15 minutes), mais assez peu en EPS, alors qu’il peut être très intéressant.  

En quoi cela consiste-il ?

Exemple en football :

Règles du jeu : 4 contre 4 ou 5 contre 5. Espace : un terrain avec 1 grand but + 2 petits buts sur les côtés pour chaque équipe. Celui qui vient de marquer un but devient gardien.  Droit de bloquer un ballon sur place avec le pied (la défense ne peut plus prendre le ballon dans les pieds d’un joueur ou d’une joueuse à l’arrêt. Le ballon n’est pas trop gonflé.

Au début de la partie, il est décidé qu’à partir d’un certain nombre de points d’écart entre les deux équipes (par exemple 3 points), le jeu devient inintéressant parce que les perdant∙es n’ont plus aucune chance de gagner.

Le jeu commence et dès qu’il y a 3 points d’écart, une personne de l’équipe gagnante tire une carte joker. Elle choisir une carte « petit coup d’éclat »  ou « petit coup de pousse ».

Les cartes « coup d’éclat » : « une (ou deux) personnes de notre équipe ne viennent pas défendre (elles sont obligées de rester dans le demi-terrain adverse, cela crée un surnombre d’attaquants) ».  « notre gardien n’a plus le droit d’utiliser ses mains » ; « nous ne pouvons marquer que dans le petit but ». Ces règles sont présentées comme un défi à relever pour l’équipe qui gagne au score (et non comme un handicap à connotation négative).

Les cartes « coup de pousse » : « vous réduisez la taille de vos buts (votre grand but fait à présent 2 mètres et les petits buts 1 mètre). « vous conservez chaque ballon qui sort du terrain, quel que soit l’équipe qui l’a fait sortir des limites » ; « vous désignez un de nos joueurs ou joueuses qui n’a plus le droit de dribbler (ou de marquer) » ; « vous avez le droit de bloquer un ballon sur place ». Ces règles donnent un avantage à l’équipe qui est menée au score. Elles sont présentées comme une aide pour mieux réussir et non comme une faveur charitable. 

Les deux équipes jouent la suite du match avec la nouvelle règle, jusqu’à ce qu’il y ait à nouveau 3 points d’écart ou jusqu’à la fin du temps de jeu. Dans un match de 15 mn, il y a au maximum 3 cartes tirées. Parfois, aucune carte n’est tirée. Le score revient à zéro à chaque tirage. Le score final comptabilise les points de chaque partie.   

Ce que ça change par rapport à un sport collectif habituel 

Au plan des valeurs : le « défi coopétitif » permet de placer les élèves dans une posture où le désir de gagner/progresser est intimement lié au plaisir de jouer/progrès de l’autre. Les modalités du défi concrétisent l’égalité des chances entre équipes qui caractérisent les sports collectifs, égalité pas évidente à mettre en place à l’école vu la grande hétérogénéité des élèves.  Elle permet d’aider les plus débutant∙es à progresser, tout en offrant une confrontation plus difficile, plus valorisante aux plus sportifs-ves. Il est intéressant que ce soit les plus sportifs-ves qui choisissent la forme « coup d’éclat » ou « coup de pousse ». Il ne s’agit pas de charité mais de défi que l’équipe se fixe, pour le plaisir de jouer et de créer de nouvelles stratégies en offrant à l’autre la possibilité de gagner à son tour.

Au plan du rapport attaque-défense / règlement: les cartes sont conçues comme des variables du règlement. Aucune ne va à l’encontre de la dynamique du jeu. Les deux lots de cartes donnent des avantages /handicaps similaires. La différence « coup de pousse » ou « coup d’éclat » ne change rien au fond, elles permettent de solliciter les élèves sur les deux modes « on vous aide / on vous lance un défi ».

Habituellement, ces variables font souvent l’objet d’exercices ou de « jeu à thème ». Dans ces jeux coopétitifs, elles sont intégrées dans le match.

Au plan de la constitution des équipes : cela facilite la tâche, puisque l’équilibre des forces peut être modifié par le règlement. La règle de la personne qui devient gardien.ne après un tir, applicable toute la durée du jeu, permet de rééquilibrer momentanément les forces de jeu ( En EPS, il faut faire attention que cela n’empêche pas des élèves qui auraient peur de devenir gardien.ne de marquer !) Si besoin, une carte « coup de pousse » peut interdire à un joueur ou une joueuse de marquer.

Au plan organisationnel : les élèves connaissent le contenu des cartes joker. C’est toujours celui ou celle qui vient de marquer le 3è point d’écart qui choisit la carte. C’est l’équipe adverse qui choisit le joueur ou la joueuse qui ne doit pas marquer (donc pas de contestation). Un temps court de négociation est accordé pour choisir quels défenseurs restent dans le terrain adverse.

Bilan : cette formule est utilisée surtout en USEP. Elle a notamment redynamisé la pratique du foot à l’école. Les « footeux-euses », après une période d’adaptation, s’y retrouvent, se projettent dans « le défi lancé à soi-même » (en choisissant majoritairement des « coups d’éclats »), les plus timoré∙es montrent un intérêt accru parce qu’iels peuvent se dépasser et tenir leur place dans l’équipe. La notion d’égalité des chances et de « justice » est vécue concrètement, avec le constat d’une nette réduction du dénigrement d’adversaire, de partenaire ou d’arbitre.

Nous lançons un appel à témoignages :  Si vous avez déjà tenté ce système de règles qui varient au cours du jeu dans votre classe, racontez-nous votre expérience ! Si vous avez envie de tenter, n’hésitez pas à nos contacter, nous pourrons ainsi témoigner ce qui marche bien, ce qui marche moins bien ou surtout quelles sont les conditions à réunir pour que ce type de jeu fonctionne en EPS !